2023 : 81 participants ont bénéficié des cours du Centre d’Art
Séance de travail avec les participants au cours de monotype (2023) animé par Killy (Patrick Ganthier). © Charly Amazan
Le Centre d’Art est parvenu a réalisé six (6) cours au profit de 81 participants pour l’année 2023, en dépit des contextes sécuritaires menaçants. Plus de la moitié d’entre eux ont bénéficié de bourses.
Les cours du Centre d’Art s’inscrivent dans sa mission de relever les artistes et de les faire rayonner. Cet objectif passe inévitablement par le renforcement de leurs capacités et leurs compétences techniques, par l’élargissement de leurs horizons artistiques et l’encouragement d’une approche critique de l’expression visuelle. Le Centre développe en ce sens un enseignement artistique destiné à toutes les couches de la société, notamment à une population qui, sans cela, n’y aurait pas accès.
Le Centre élabore une approche pédagogique consistant à proposer des artistes majeurs comme mentors aux les artistes émergents. Cette initiative vise à créer un environnement propice à la collaboration artistique, offrant aux artistes émergents l’opportunité de bénéficier des conseils, de l’expérience et de l’accompagnement de ceux qu’ils considèrent souvent comme des modèles. L’objectif ultime est de fournir aux jeunes artistes des perspectives enrichissantes, d’élargir leurs compétences et de les aider à progresser dans leur carrière créative.
La carrière d’Antonio Joseph peut servir pour illustrer la pertinence de cette approche pédagogique. En 1944, il est le premier élève et membre inscrit au Centre d’art lors de l’ouverture officielle de l’institution. Il y étudie le dessin géométrique et l’aquarelle avec Dewitt Peters. Plus tard, le plasticien qui est devenu le premier artiste Haïtien à recevoir une bourse de recherche et de perfectionnement de la fondation Guggeinheim, a enseigné au Centre d’art la peinture, le dessin, la céramique et la sérigraphie.
Antonio Joseph qui dispense un cours de dessin en 1980. © Archives le Centre d’Art
Cette année le Centre avait programmé 8 cours dont 4 par session. La première session a été une réussite. Les 4 ateliers sont arrivés à terme.
Olivier Ganthier, animateur du cours de graffiti est le premier à faire la restitution de son cours. Pour l’occasion, les 16 participants ont réalisé un mural sur la surface de l’arrière-cour du Centre d’Art, chacun d’eux reproduisant un dessin qu’il avait préalablement créé.
Roussel Dat, qui a fait le portrait d’un enfant dans le mural, a cumulé dans ce cours, des techniques lui permettant de travailler sur de grandes surfaces. « À présent, je peux travailler sur n’importe quelle surface », a confié le jeune artiste qui rêve de consacrer sa carrière artistique à l’art mural.
Restitution du cours de graffiti. © Charly Amazan
Ce cours, Roussel le cherchait depuis plusieurs années. « Impossible de trouver des ateliers de graffiti dans le pays. Je venais à peine de me procurer quelques bombes (de peinture NDLR) pour m’initier seul, quand un ami m’a parlé du cours. Je n’ai pas hésité d’une seconde », a rapporté le plasticien, qui a affronté Martissant pour venir participer à ce cours.
Pierre-Michel Jean, animateur du cours de photographie intermédiaire, avait demandé aux participants, pour la restitution de son cours, de présenter, chacun, un projet de photographie ou documentaire à travers lequel il aborde un sujet de société.
Tania Jean Louis, par exemple, a réalisé un projet portant sur l’alimentation des étudiants de l’Université d’État d’Haïti, en particulier ceux de la Faculté des Sciences Humaines.
Tania Jean Louis et le rendu de son projet. © Charly Amazan
L’augmentation de l’inflation qui a atteint 49.3 % au mois d’avril 2023 et l’insécurité alimentaire affectant 5,6 millions de personnes en Haïti, selon l’ONU, n’ont pas épargné les étudiants de la FASCH, selon Tania qui intitule son projet « 162 gourdes ». Ce montant est en moyenne ce dont dispose un étudiant pour se nourrir durant une journée selon une enquête qu’elle a menée. Le choix de nutriments avec une telle somme est très restreint. « Un plat chaud peut coûter entre 250 à 500 gourdes. Une boisson même gazeuse coûte entre 75 à 100 gourdes », a-t-elle recueilli. L’étudiant se console avec un paté kòde (chaussons feuilletés avec du poulet, ou du hareng, parfois d’œufs frits à l’huile chaude), pen ak manba (pain au beurre de cacahuètes).
Tania Jean Louis, en soulevant cette problématique, veut « dénoncer la qualité nutritionnelle des futurs cadres et intellectuels du pays ». Elle souhaite aussi « interpeler et conscientiser les décideurs et les leaders de la société civile ».
Pierre Pascal Merisier, et Frantz Zephirin ont été respectivement les mentors dans les cours de gravure et d’art appliqués.
Pour la deuxième session, seulement les cours de photographie pour débutants, dirigé par Réginald Louissaint, et le monotype conduit par Patrick Ganthier, ont débuté et ont été achevés. Ils ont été programmés le 17 et 27 juin 2023. Les cours d’arts appliqués et de peinture pour débutants n’ont pas eu lieu à cause des conditions de sécurité qui se sont dégradées dans la capitale.
Pour les deux sessions, le Centre d’Art a accueilli 81 participants dont 20 femmes et 61 hommes, âgés entre 14 ans et plus de 50 ans. Parmi le nombre admis en cours, 42 ont bénéficié de bourses et 6, de demi-bourses.
Ces bourses et demi-courses sont octroyées aux artistes suivant une méthode méritocratique. Un jury composé des membres du Centre d’Art et des professeurs-artistes les attribuent en fonction des éléments du dossier soumis par le demandeur de bourse tels que la potentialité artistique, les conditions économiques et sociales.
Lougens Pierre Dorelus dans l’atelier de gravure. © Charly Amazan
J’ai toujours eu que des bourses ou des demi-bourses au Centre d’Art. Sinon, j’aurais eu des difficultés à suivre ces cours.
Lougens Pierre Dorelus
Ces bourses sont des aubaines pour des artistes qui, sans cela, n’auraient pas pu participer aux cours. « J’ai toujours eu que des bourses ou des demi-bourses au Centre d’Art. Sinon, j’aurais eu des difficultés à suivre ces cours », a témoigné Lougens Pierre Dorelus qui fréquente le Centre depuis 2019.
Naïka Séphora Aurélus est une jeune peintre. Elle a participé cette année dans les cours arts appliqués et gravure (monotype). « C’est la première fois que j’ai essayé cette technique et c’était vraiment extra comme expérience », dit-elle du cours de gravure. « Dès la première séance, nous avons appris à cerner la technique, à mélanger les encres, à apprendre à dessiner sur le verre etc… Nous avons tout appris dans la pratique », ajoute-elle.
Ce soutien m’a beaucoup aidé pour avancer un peu plus vers mon objectif d’artiste parce que je n’allais pas pouvoir tout payer toute seule
Naïka Séphora Aurélus
Elle a bénéficié d’une demi-bourse pour le premier cours et une bourse pour le second. « Ce soutien m’a beaucoup aidé pour avancer un peu plus vers mon objectif d’artiste parce que je n’allais pas pouvoir tout payer toute seule », a-t-elle concédé.
Naïka Séphora Aurélus dans l’atelier de gravure. © Charly Amazan
Pour l’année 2024, le Centre programmera 3 cours : la photographie intermédiaire, le gravure et les arts appliqués.